Le COUDIER (Grange aux Moines)
87240 Ambazac
Vestiges
:
La grange du Coudier ou la grange aux Moines se trouve aux confins de la commune
d'Ambazac, près de celle de St Sylvestre. Pour y parvenir d'Ambazac prendre
la D 44 qui va à Saint-Sylvestre, la grange se trouve sur une route à
droite de la D 44 à 3 km d'Ambazac.
C'est un très vaste bâtiment rectangulaire ayant un pignon au Sud-Est
dont le mur plat est percé de trois fenêtres dont la fenêtre
centrale à la forme d’une lancette. Ce pignon Sud-Est date du milieu
du XIXe siècle, date à laquelle les nouveaux propriétaires
firent démolir deux travées en mauvais état sur les dix
existantes alors. Ils se servirent des pierres pour construire la grande maison
qui se trouve dans le prolongement de la grange en contrebas.Plan de la grange
du Coudier vers 1830 (1 J 30)
Avant destruction des deux travées S-E Cette grange possédait
une chapelle et quelques pièces pour le logement des moines convers,
et un très grand local à usage agricole. Une magnifique charpente
en bois est un chef-d’œuvre d’élégance et de
hardiesse qui a résisté à l’épreuve du temps.
Les propriétaires qui l'ont dans leur patrimoine depuis plusieurs générations
se sont attachés à sauvegarder ce patrimoine en créant
dès 1977 une association « la Grange aux Moines ». La charpente
fut refaite en 1980, et cette association reçut en 1982 le premier prix
du concours national des chefs d'œuvres en péril .
façade Est |
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façade Sud |
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Histoire :
Après 1070 Gérard de Jau où Jaunac donna sa manse du Coudier
à l’abbaye de Solignac, puis au temps du prieur Gérard Ithier,
en 1194, Adémard, Abbé de Solignac, avec le consentement de son
chapitre donna aux frères de Grandmont le lieu du Coudier . La construction
de la grange qui correspondait à un urgent besoin dut être entamé
tout de suite. Cette donation fut confirmée par son successeur en 1228.
L’abbé Nadaud pouvait écrire : « Visitez ces lieux,
où cette action, languissante depuis trois siècles, est éteinte
désormais. Les prairies les plus fertiles du Limousin sont sur ce sommet.
Le sol sablonneux des bruyères non monastiques vous montrera ce qu’était
toute la région à l’origine. Dans les vallées, des
écluses colossales emprisonnèrent les eaux, et transformèrent
en étangs les marais insalubres. Ainsi furent créés le
Grand et le Petit-Jonas. Les eaux stagnantes, noyées dans les eaux vives,
transformèrent en riches viviers les marécages d’où
sortaient les fièvres et la mort ; et bientôt ce sol infécond
vit s’élever une grange longue de deux cents pieds, divisée
en trois nefs, comme une cathédrale, par deux rangées de piliers
gigantesques, et ce vaste édifice avait peine à contenir les moissons
recueillies sur ce sol auparavant aride. Grandmont devint le grenier, l’hospice,
la providence d’une région naguère misérable…
»
Henri III donna à toutes les maisons de l'Ordre qui étaient en
Aquitaine la juridiction haute et basse, et le Prieur Caturcin exerça
cette juridiction dans ses assises tenues dans la Grange du Coudier, près
Grandmont vers 1226. Lors du siège de l’abbaye à la fin
du XVe siècle par le seigneur Saint-Germain Beaupré et sa bande
de huguenots, et dont il s’empara, non sans effusion de sang la grange
fit office de temple protestant. Elle dut être comme l’abbaye délivrée
de cette occupation en 1604 sous l’impulsion de l’abbé Rigaud
de Lavaur.
Cette grange subsistait encore au XVIIIe s ; l'abbé Nadaud, qui l'avait
visitée, dit qu'elle était capable de contenir la récolte
de quatre domaines que les religieux ont en cet endroit, et de loger tous les
hommes et le bétail . Et dans une note de bas de page le chanoine Lecler
écrit :
“ Au XIIe siècle, les ordres religieux agriculteurs, tels que les
Cisterciens, les Grandmontains, pour l'exploitation de leurs propriétés
avaient formé des groupes qui avaient pour centre un établissement
appelé Grange. C'était souvent un logement considérable,
capable de recevoir les hôtes, et où l'on pouvait célébrer
la messe et faire l'office, comme il est dit dans la bulle d'Alexandre IV de
l'an 1255. Telle était la Grange du Coudier, dans la paroisse d'Ambazac,
sur la limite de celle de Saint-Sylvestre. D'autres n'étaient que de
simples métairies. Mais les Granges, quelle que fût leur importance,
n'étaient point des monastères et les moines ne pouvaient pas
y habiter à poste fixe. Les frères convers qui y habitaient et
en exploitaient les terres, devaient venir reposer, après leur mort,
à l'ombre de la croix de Grandmont. ”
En fait la grange du Coudier conçue à l’origine pour un
faire-valoir direct perdit dès la fin du XIIe siècle et le début
du XIIIe siècle cette affectation avec la disparition des convers. Grand
bâtiment, elle servit donc de lieu de réunion à caractère
laïc, comme les assises tenues par Caturcin en 1226, et surtout de grange
dimière. Le terrier de 1496 ne fait plus mention que de domaines confiés
en quasi-totalité à des paysans tenanciers, confirmant l’abandon
du système de faire valoir direct, et donc de l’usage pour lequel
elle avait été construite. Elle servit néanmoins à
recevoir les dîmes dues à l’abbaye.
La grange fut vendue comme bien national à la Révolution le 22
décembre 1792 au citoyen Blaise Tayac. Elle passa dans le patrimoine
successivement des familles Boudeau, Imbert, Nivet, Rigonnaud, Bourant, Baignol,
Demartial. Le 20 août 1846 la grange fut rachetée à M Demartial,
propriétaire du château de la Barre, par M Wast Gay, et depuis
cette époque elle est restée dans le patrimoine de la famille
Pénicaud.