La
date de fondation des deux obédiences est pratiquement la même,
1076 pour les Grandmontains, et juin 1084 pour l'Ordre des Chartreux.
Saint Étienne de Muret était né à Thiers vers
1045, et saint Bruno à Cologne vers 1030.
Saint
Bruno
Saint
Bruno après avoir été ordonné prêtre
vers 1050, retourne à Reims où il avait fait ses études.
Il succède à son maître Hermann comme écolâtre
vers 1056. Il enseigne la théologie pendant une vingtaine
d'années. Il aura de très nombreux élèves
dont un futur pape, Urbain II. Il lutte contre la simonie (commerce
des biens spirituels) pratiqué par son supérieur,
l'archevêque de Reims. Celui-ci lui enlève sa chaire,
saisi une partie de ses biens et le chasse. Quant l'archevêque
est déposé en 1080 il refuse la succession et choisit
la vie d'ermite. En compagnie de deux amis il va en Bourgogne pour
se joindre à Robert de Molesme le fondateur des Cisterciens.
Mais son idéal contemplatif le pousse a gagner la Savoie
en compagnie de six compagnons. L'évêque de Grenoble
est un de ses anciens disciples. Il fonde un monastère dans
le massif de la Chartreuse en 1084. Son ancien élève
devenu pape, Urbain II, l'appelle à Rome. A contrecoeur il
obéit, mais au bout de quatre ans il obtint, à condition
de rester en Italie, la permission de fonder un monastère.
Ce fut en Calabre à Santa Maria della Torre. C'est à
cette époque qu'il refuse l'évêché de
Reggio de Calabre illustré par le tableau retrouvé
dans le grenier de l'hospice de Pont-Audemer. Un de ses successeurs,
le prieur Guigue rédigera les coutumes de l'Ordre des Chartreux,
conciliant l'idéal érémitique et cénobitique.
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Le
tableau retrouvé dans le grenier de l'hospice de Pont-Audemer
venant du prieuré de N-D du Parc de
Rouen |
Malgré
une similitude de conception de vie religieuse, les Chartreux étaient
des ermites solitaires et les Grandmontains des ermites communautaires;
d'où une conception différente d'implantation des bâtiments
conventuels. Les implantations cartusiennes seront faites sur les normes
fixées par saint Bruno pour une vie érémitique en
solitaire. Il y aura donc une maison haute comprenant l'église,
la sacristie, le chapitre, le cloître, les maisons des pères,
une cuisine et un réfectoire pour les repas en commun le dimanche.
Car les Chartreux associent à la rigueur d'une vie solitaire, cet
élément important de la vie communautaire qu'est le repas
en commun. Ce genre de vie original entraînera une disposition également
originale des bâtiments propre à l'Ordre, rompant avec la
tradition bénédictine adoptée par les autres ordres.
Car pour fournir à chaque moine sa cellule de quatre pièces
plus un petit jardin, le monastère occupe des surfaces assez considérables.
Chaque cellule marquée d'une simple lettre donne sur un grand cloître
ayant un cimetière en son centre. À côté se
trouve la partie vie commune, église, sacristie, réfectoire
et cuisine. Plus bas se trouvait la maison basse ou correrie destinée
aux moines convers.

La
chartreuse du Liget (Indre et Loire)
à
g. l'entrée du cloître, à dr. l'église
(XIIe s.) |
Les
relations entre les deux ordres furent certainement peu fréquentes,
leurs implantations géographiques différentes en furent
peut-être la cause. Les Grandmontains étant établis
dans l'Ouest de la France et les Chartreux dans le Nord et l'Est.
Peu de fondations des deux communautés étaient proches,
une demi-douzaine au maximum. N.-D. du Parc à Rouen et la
chartreuse Saint-Julien au Petit-Quevilly fondée en 1669.
Par contre peu de chance que leurs annexes d'Aubevoie abandonnée
aux Jésuites en 1633, et le domaine des Chartreux de Bourbon-lez-Gaillon
occupés par eux en 1578, aient pu donner l'occasion aux deux
communautés d'avoir eut des contacts. Dans l'Indre et Loire,
la chartreuse du Liget fondée en 1170 est très proche
du prieuré de Villiers, avec laquelle elle avait des contacts.
Par
contre nous savons que les Grandmontains de Vieupou avaient l'occasion
d'avoir recours aux Chartreux de Valprofonde, l'affaire des esprits
frappeurs en 1733 en est la preuve, comme le voyage des deux bénédictins
de Martène et Durand mentionnant qu'ils allaient de l'une
à l'autre communauté.
Les
chartreuses limousines.
Il
y avait deux chartreuses seulement en Limousin : Le
Glandier et Mortemart.
La
chartreuse du Glandier est proche de
deux possessions grandmontaines, Charniac et Malgorce, ainsi que
la chartreuse de Mortemart avec la
possession grandmontaine du Rousset; mais ces dernières n'avaient
plus depuis 1317 de vie religieuse propre, et l'existence de Mortemart
fut également éphémère, 1335 à
1413 ! |
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