Barbetorte (Vendée)

Localisation :
A Luçon prendre la sortie ouest, direction Talmont-St-Hilaire (D 949). Après quelques centaines de mètres, prendre à droite la D 50 en direction des Magnils-Régniers. A l’entrée du bourg, prendre à droite la rue du Mont-Doré pendant 50 mètres. Barbetorte se trouve au bout d’un chemin à gauche de la route, en lisière de bois.
Intérêt :
Église (?) 0.

Vestiges :
Aucun vestige, si ce n’est un chapiteau double retrouvé par les propriétaires actuels.
Peut-être une levée de terre se terminant par un tas de pierres en rond à 30 m à l’Est de la maison d’habitation pourrait indiquer l’emplacement de murs détruits.

Histoire :
Sa fondation serait de 1195. Elle est attribuée à Richard-Coeur-de-Lion. Cette supposition vient d’une confirmation de Richard au prieur et aux moines de la Meilleraye, ainsi qu’aux moines de Bonneray et de Barbetorte, de droits donnés par son père Henri II sur la possession de leurs bois; droits donnés jadis par la reine Aliénor .
En 1285 Barbetorte hébergeait 6 religieux, et fut uni en 1317 au prieuré de Sermaize (n°18), puis ensuite directement au Chef d’ordre le 23 janvier 1342 .
Il semble que cette annexe n’ai plus eu de conventualité depuis cette époque. Elle est devenue un simple bénéfice agricole et surtout forestier. On trouve en 1598, un bail de l’abbé de Grandmont François Marrand à un parent Claude Marrand, sieur de la Croix, habitant le bourg de Rancon (Hte-Vienne), de différents prieurés dont Barbetorte. Toutefois les messes de fondation furent assurées dans la chapelle jusqu’au début du XVIIIème siècle. Des correspondances de cette époque nous en donnent la preuve.
Du curé des Magnils :
“ 1677 - Je soussigné et confesse avoir reçu de M Courtin, échevin et maire de cette ville, la somme de 60 livres, pour la livraison d’un calice et de sa patène que j’ai fait faire pour la chapelle de Barbetorte”
“30 juin 1689 - Reçu de M Courtin, pour le service de la chapelle de Barbetorte, la somme de 50 livres”
Même chose le 30 juin 1689, le 30 décembre 1692, le 30 octobre 1693, etc, jusqu’au 7 mars 1713, où le curé reçoit deux années. A noter qu’à cette époque la ferme rapportait 650 livres annuels
Puis les choses semblent se gâter, le 27 février 1712, M Courtin écrit ceci, au Procureur Général Dom R.P Maledent :
“Je pars pour aller dire au curé des Magnils qu’il cesse de dire les messes (de fondation) de Barbetorte, et je prévois qu’il faudra lui payer la dernière année depuis la St Michel jusqu’à N-D de Mars prochain”.
M Courtin ne semble pas s’être bien acquitter de la gestion de Barbetorte ou tout au moins pas au goût du Procureur Général, car on trouve la lettre suivante de Dom Maledent datée du 20 septembre 1712 :
“Monsieur,
Nous avons un petit prieuré près de Luçon, nommé Barbetorte. Il y a très longtemps que Mrs Courtin de Fontenay le Comte en ont joui comme fermiers de père en fils, mais comme celui-ci, qui est Conseiller Honoraire au siège de Fontenay, en agissant mal, M l’Abbé lui ôte la ferme ou plutôt à celui qui lui prête son nom, et dont il est caution, et la donne à deux particuliers de Luçon...”
Effectivement le 14 novembre 1712 M Delalande, le nouveau fermier, écrit à Dom R.P Maledent :
“Nous avons cru être obligé de vous donner avis de l’état des bâtiments de Barbetorte qui menacent ruine et surtout du pignon de la grange où se fait le vin du coté du Treuil ”.
et le 19 décembre de la même année :
“La maison des métayer va par terre, faîtes la couverture il est de votre intérêt de mettre ordre au plus tôt.”
On du donner l’ordre de faire des réparations, car le 26 mars 1713 on relève une proposition de réparation de la toiture de la chapelle pour la somme de 1.300 livres. Le 28 avril 1714 un état des réparations est établi :
“État des réparations faites au prieuré de Barbetorte et ses annexes par moi, faites tant pour les matériaux que façon d’ouvriers : 3.000 tuiles et deux tonneaux de chaux...un tonneau de clous, un mille d’aiguilles...plus avons fait peindre un saint Laurent et un devant d’autel et le gradin... ”
Le cure des Magnils reçoit encore pour ses bons services 50 livres le 10 août 1714. Mais ce fut sans doute une des dernières fois, car le 12 septembre 1717, on trouve une lettre du curé Gautereau :
“..Je ne puis m’empêcher de vous marquer que ces réparations de vitres sont à peu de chose, j’entre dans vos raisons quand vous dites que ces réparations sont exorbitantes....Premièrement, dans le bas de votre chapelle ,à la fenêtre un châssis de bois dormant suffirait qui va à peu de chose, dans les deux autres du haut de la chapelle, il ne serait point nécessaire de mettre des vitres partout..
..de plus le sieur Delande me surprit beaucoup en disant qu’ils avaient ordre de vous, de ne me payer la rétribution des messes de cette année. Je ne sais d’où cela peut provenir, c’est une énigme pour moi. J’ai agi de bonne foi, croyant que vous seriez bien aise que les messes se disent...Mgr m’a donné la permission par écrit d’acquitter les messes au Magnils jusqu’à ce que la chapelle soit en état, et je suis convaincu que je suis très content de faire ce service à votre chapelle...”.
On ne trouve plus trace de desserte des messes de fondation à partir de cette date.
Un procès-verbal de visite du 13 juin 1731 fait l’impasse sur l’état de la chapelle :
“ et de là nous sommes allés dans une allée qui conduit à la chapelle dans laquelle il nous a apparu qu’il y a eu une porte du coté du midi. Laquelle est tombée, à laquelle il manque un gond et une pommelle, et laquelle étant barrée à neuf peur servir. A laquelle il nous a paru y avoir jamais eu aucune ferrure, ni verrou; et depuis nous a été représenté une vieille serrure en bois, en ruine de caducité et de vieillesse. De là sommes allés dans une écurie...”
Tout le reste du procès-verbal décrit des bâtiments à l’abandon (voir pièces).
Barbetorte est affermé le 15 Mars 1748 à François Thiré et Françoise Augé sa femme devant Me du Tourneau et Nouhant, notaires à Luçon, pour la somme de 1000 livres; la ferme commençant à Notre-Dame de Mars 1748.
Un terrier est dressé le 1er Mars 1751 , il donne de nombreux renseignements sur les revenus temporels du prieuré. 117 reconnaissances sont établies, la plupart concernent des revenus portant sur de petites contenances, d’un demi à quatre journaux de vigne. En voici quelques exemples :
le 2 Mars 1751
François Veneau, vigneron, demeurant en la ville de Luçon paroisse de St Mathurin .. a reconnu et confessé par cette présente tenir en la paroisse et dépendance du prieuré, quatre journaux de vigne situés sur le fief du prieuré devoir être obligé de payer chaque an au révérendissime père en Dieu Dom François Xavier Mondain de la Maison Rouge à cause du prieuré la cinquième partie des fruits naissants croissants de quatre journaux de vigne et un denier de solage par journal en portant vente et honneur, fief et juridiction, a promis s’être obligé par cette présente de payer, porter, savoir continuer à l’avenir chaque an étant en saison de vendanges, de l’apporter au treuil du prieuré de Barbetorte
le 4 mars 1751
Jean Boislard, vigneron, demeurant au bourg des Magnils a confessé détenir deux journaux de vigne situés dans le fief des Essarts de Barbetorte, plus un journal de vigne situé au fief Long. Pour raison du tout, reconnaît devoir payer chaque an au révérendissime père en Dieu.... en son absence à Dom Armand Jean Lamirault, prêtre, religieux, procureur-syndic, fondé de procuration, la cinquième partie des fruits naissants, croissants, et pour 3 journaux de vignes confrontant, un denier de solage par journal. Il reconnaît à chaque saison de vendange porter au treuil du prieuré...
Le 4 mars 1751
Louis Bris, journalier, demeurant au bourg paroisse des Magnils-Régniers, a reconnu et confessé tenir en la paroisse un journal et demi de vigne situé au fief Long, seigneurie de Barbetorte, plus un quart de journal au même fief en vigne, plus un demi-journal de vigne en friche depuis six ans, nommé Tublier, plus un demi journal situé au fief de la Croix. Pour raison de quoi devoir à révérendissime Dom François Xavier de la Maison Rouge en son absence à Dom Armand-Jean Lamirault, prêtre, religieux, procureur syndic de ladite abbaye: savoir le cinquième des fruits naissants croissants et pour les deux journaux 3/4 ci dessus, un denier de solage par journal comportant fief et honneur
4 mars 1751
Pierre Nicolas Gaucher, journalier, demeurant au bourg des Magnils a reconnu, confessé, détenir quatre journaux de vigne situé au fief Long, plus un demi journal situé au même fief....
Marie Biron veuve de François Bigot journalier demeurant au village de Beugné, a reconnu...deux journaux de vigne, situé au fief de la Croix, devoir la 5ème partie des fruits naissants....8 mars 1751
Louis Coulais, laboureur, Village de Beugné,... pour un journal et demi de vigne détenu au fief Long, plus 3 journal de vigne au fief des Essarts, est obligé de payer chaque an, la 5ème partie et un denier de solage par journal, et de continuer à l’avenir de porter sa récolte au treuil...
8 mars 1751
Jean Grignon, journalier, demeurant au Village de Beugné, paroisse des Magnils, ...un journal et demi de vigne au fief de la Croix. Doit la 5ème partie des fruits.. promet porter au treuil...
8 mars 1751
François Roy journalier et Simon Couaillaud aussi journalier, demeurant au Village de Beugné, paroisse des Magnils, ...1/2 journal de vigne au fief Long
plus ledit Couaillaud déclare posséder indivis avec Marie Couaillaud sa soeur ...un journal de vigne situé au fief de la Croix. Doit la 5ème partie des fruits... et de continuer à l’avenir de porter au treuil... plus un denier de solage par journal.
8 mars 1751
Mathurin Riché marchand en la ville de Luçon, curateur aux enfants mineurs de feu Louis Jumauleau et Jeanne Beaupeux, un journal de vigne au fief de la Croix. Doit la 5ème partie fruits.. un denier de solage par journal
8 mars 1751
Marie Guillaudeau veuve de Marin Agent journalier demeurant au bourg des Magnils, un journal de vigne au fief long, doit 5ème partie fruits naissants...et un denier de solage par journal
9 mars 1751
Jean Regnaudin 2 journaux au fief de la Croix, plus un demi journal, même fief, plus un journal au fief des Grives. plus un demi journal au fief Long - plus un journal même fief
9 Mars 1751
Charles Dibot, laboureur, demeurant au bourg des Magnils : un journal de vigne au fief des Essarts plus cinq journaux de vignes au fief Long, plus un journal de vigne au fief de la Croix, plus un demi journal de vigne en friche au fief des Essarts.
.....
11 mai 1751
Louis Bridonneau, journalier, demeurant bourg des Magnils, ... a un journal et demi de vigne en friche au fief des Essarts joignant la vigne en friche d’André Mainardeau située fief des Essarts, plus un journal de vigne au fief de la Croix....
Par contre d’autre déclarations font état de surfaces nettement plus importantes :
12 janvier 1752
Paul-François Marchegay de Lernière, conseiller du Roi, Lieutenant de l’élection de Fontenay-le-Comte, a reconnu par les présentes détenir :
premièrement vingt journaux de vigne situés au fief Long plus onze journaux de vigne, situé même fief
plus sept journaux de vigne, même fief
plus huit journaux de vigne, même fief
plus deux journaux de vigne, même fief
plus un journal de vigne, même fief
plus deux journaux de vigne en friche, même fief
plus un journal de vigne en friche, même fief
plus onze journaux de vigne en friche, même fief
plus huit journaux de vigne, au fief de la Croix
plus deux journaux de vigne, au fief de la Croix
plus un journal de vigne actuellement en friche, au fief de la Croix
plus un journal de vigne également en friche, au fief de la Croix
plus deux journaux de vigne, actuellement en friche, au fief de la Croix
plus un journal de vigne en friche, au fief de la Croix
plus cinq journaux de vigne, au fief de la Croix
plus deux journaux vigne en friche, au fief des Essarts
plus huit journaux de vigne en friche, au fief des Essarts
plus deux journaux de vigne en friche, au fief des Essarts
plus 7 journaux de vigne actuellement en friche, au fief des Essarts
plus 3/4 boisselés de terre labourable en quinze sillons, situées au ténement des Grands Champs, paroisse des Magnils
plus une demi-boisselée de terre labourable en neuf sillons situé au même ténement
plus trois quart de boisselée en terre labourable, même ténement
plus deux boisselées de terre labourable, ténement de la Touche, paroisse des Magnils
plus trois boisselés, terre même ténement.
plus six boisselées de terre labourable au ténement de la Minière, paroisse des Magnils. Plus une masure autrefois chambre, avec une planche de jardin situé en la rue du Châtelet.
plus une masure situé à coté de la cours des Magnils.
savoir, doit le cinquième des fruits croissants, un denier de solage par chaque journal de vigne, et sur lesdites terres de payer, porter, et continuer à l’avenir chacun an à la saison de vendange et moisson de porter au treuil et granges du prieuré....
On constate que de nombreuses parcelles de vigne sont en friches, et cela de façon récente; six ans, reconnaît un déclarant. Il semble qu’il y ait eu surproduction et mévente du produit à une époque où le vin ne se conservait pas plus d’un an. On constatera également le même fait en prenant connaissance du terrier du prieuré de la Meilleraye. Tout ces revenus temporels multiples et éparpillés vont être par la suite affermés, ce qui dispensera les religieux a entreprendre une guerre d’usure pour obtenir leur du, ainsi que l’obligation d’entretenir un treuil et une grange.
Le 6 décembre 1751, un contrat est conclut pour réparer les murs de clôture de Barbetorte :
“Aujourd’hui sixième jour de décembre mil sept cent cinquante et un, par-devant notaire garde notes à Luçon...ont comparu Dom Armand-Jean Lamirault, prêtre, religieux, procureur syndic de l’Abbaye chef d’Ordre de Grandmont y demeurant ordinairement province de Haute-Marche, paroisse de St Sylvestre diocèse de Limoges étant présent dans cette ville d’une part,
et Jean Glaumée, maître maçon, demeurant au village du Pont, paroisse de Sousbersac, aussi en Haute-Marche, étant aussi présent audit lieu d’autre part,
Entre lesquelles parties a été fait le marché qui suit :
savoir que ledit Glaumée promet de faire et reconstruire à neuf depuis les fondements tous les murs et clôtures du prieuré de Notre-Dame de Barbetorte en la paroisse de Magnils-Reigniers près de la ville de Luçon dépendant de l’abbaye de Grandmont...à prendre les dits murs suivant l’ancienne enceinte, lequel murs seront de deux pieds d’épaisseur dans le bas et d’un pied et demi sous le chapeau et seront de sept pieds de hauteur sous ledit chapeau, qui sera d’un pied et qui sera entouré de huit pieds hors de terre. Promet aussi Glaumée de faire quatre bons piliers de pierre de taille, à chaux et à sable, bien solide, pour y attacher des portes ou barrières. Comme aussi de bâtir à neuf une porte dans le mur vis à vis le bois de réserve de deux pieds trois pouces de large sur cinq pieds de haut...”
On demande réparation des bâtiments au fermier pour sa négligence dans son entretien :
“Le 18 février 1752 M Abraham-François Théronneau du Pevieau a reconnu au terrier, et s’est obligé à rebâtir suffisamment la maison, la grange, et les murs de clôture de la maison du Petit-Barbetorte et Curzon, qui sont entièrement ruinés par la négligence des auteurs dudit sieur Théronneau. Il faudra avoir le soin de faire rendre une autre déclaration dans dix ans, et avoir attention à faire relever les bâtiments qui font l’objet de conséquence pour la ferme à venir.”
Pour faire reconstruire le Chef d’Ordre, en piteux état, le Roi consent à l’adjudication de nombreuses coupes de bois, dont à Barbetorte.
“Arrêt du Roi du 27 avril 1750. Extrait du registre du Conseil d’Etat.
Sur la requête présentée au Roi en son Conseil par l’Abbé, Chef général de l’ordre de Grandmont, situé dans la Marche dépendante du Poitou. L’église et bâtiments soit la vétusté, ou la mauvaise construction, sont tombés dans une ruine totale, quelques précautions qu’on ait prises pour les soutenir, tant qu’ils ont été susceptible de réparation. Que cette ruine est constatée par un procès-verbal du Sr de Tourny, intendant de Limoges, commis à cet effet par arrêt du Conseil du 31 Mai 1732. Par ce procès-verbal au 1er août 1732, le devis estimatif dressé par le nommé Naurissart, ingénieur des Ponts et Chaussées...coûtera la somme de 310.447 livres 10 sols... ”
Le 12 mai 1760, Jean Cormel, géomètre-arpenteur juré du Roi en la maîtrise particulière de Fontenay, procéda à l’estimation des bois
Les bois furent coupés, mais furent loin de produire la somme requise pour entamer les travaux.
Après la dissolution de l’ordre, Barbetorte était encore un bénéfice du Chef d’ordre. On trouve le 2 avril 1780 l’acte suivant :
“Le sieur Jean-Charles Reveillaud, marchand, demeurant à Luçon, fondé de procuration général et spécial du R.P en Dieu Dom François-Xavier Mondain de la Maison-Rouge, dépendant immédiatement du Saint-siège, conseiller du Roy, et aumônier ordinaire...
et le sieur Jacques Raffin, fermier boulanger, demeurant à Luçon affermé Barbetorte pour sept ans. La première année commençant pour la fête de N-D de Mars prochain, finissant en 1787...consistant en maison, grange, treuil, écurie, étable, fournil, toits, cour, jardin, droit de fief, complant, terrages, près, terres labourables et non labourables, bois, taillis, cens, rentes et autres droits...”
Mais si l’abbaye perçoit encore des revenus de Barbetorte, la maison par contre sert de “maison des champs” aux jeunes séminaristes de Luçon.
A la Révolution, les terres, les bois et la maison, ou du moins ce qu’il en subsistait, une grande salle à manger, une cuisine et deux chambres en ruines, une maison à loger le bordier, un jardin, des terrains furent vendus comme bien national. Le 19 juillet 1795, une estimation est dressée par un expert pour un acquéreur éventuel, M Guillaume Rampillon, demeurant aux Magnils-Reigniers .

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