Histoire
de la statue dite de Saint Pardoux d’Étricor
La première
mention dans les écrits de l’appellation de St Pardoux
d’Éstricord remonte au 26 juin 1557. Jusque là,
les écrits traitent du rapport des terres du prieuré ou
cellule ou correctorie vulgairement appelé Estricord. A cette
époque c’était le chanoine Bertrand de la Boixière,
chanoine de la Collégiale de St Junien, qui était prieur
commendataire d’Étricor. Il devait décéder
en 1557, et c’est lors de l’intronisation de son successeur
que l’on note sa prise de possession « du prieuré
appelé Saint-Pardoux d'Estricord dans la principauté de
Chabanais ».
A cette époque un pèlerinage était d’un grand
profit pour le propriétaire du lieu. La chapelle seule subsistant,
les bâtiments conventuels étaient en ruines ; l’Ordre
de Grandmont éleva Étricor en lieu de dévotion
à Saint Pardoux, saint très vénéré
dans la région pour la guérison du bétail. Pour
avoir un réceptacle à cette dévotion, on commanda
à un sculpteur une statue. Il n’est pas impossible que
cette statue ait été une œuvre de rachat du sieur
de la Boixière lors de la transaction qu’il fit en 1590
avec l’Abbé de Grandmont en réparation d’avoir
« fait abattre la maison du prieuré » . Comment était
cette statue ? M. J-H Michon nous la décrit telle qu’il
l’a vue en 1844 « Statue en pierre de Saint Pardoux. Il
est nu-tête et nu-pieds, vêtu en solitaire avec une grosse
corde à la ceinture. Il tient un livre de la main droite »
Lors de la dissolution de l’Ordre de Grandmont en 1772, la dévotion
continua car la gestion d’Étricor fut reprise par l’évêché
de Limoges jusqu’à la Révolution.
« Bien National » Étricor fut vendu en 1793 à
la famille Barbarin-Lamartinie, puis en 1835 Étricor fut revendu
aux Goursaud de la Jousselenie.
La légende veut qu’un des propriétaires peu soucieux
de maintenir les dévotions, transforme la chapelle en bergerie.
Mais la dévotion restait vivace dans la population, les pèlerins
venaient toujours faire leurs dévotions et prier Monsieur Saint
Pardoux. Que se passa-t-il ? Une légende dit que le propriétaire
furieux de voir venir ces pèlerins, demanda à son métayer
de prendre la statue du saint, réceptacle de cette vénération,
et de la jeter dans le ruisseau. Mais en 1844 elle semble être
de nouveau dans la chapelle.
Étricor ayant été donné par Mme Marguerite
Goursaud de la Jousselenie à ses neveux M et Mme Gaston de la
Brunye. Ceux-ci firent des grands travaux de restauration à la
chapelle. La statue ayant été râpée par les
pèlerins avec leurs canifs était inutilisable. Car lorsqu’une
personne ou un animal, généralement bovins ou ovins, était
malade, dans la mesure du possible elle devait entrer en contact avec
la statue pour obtenir sa guérison. C’est ce que nous révèle
le livre de Joseph Mallat . Le propriétaire chercha une solution,
M J. Mallat nous la donne : « Pour la remplacer à moindre
frais, on eut recours à un procédé ingénieux
que nous ne recommanderons pas aux amis de la vérité.
On savait qu’un certain nombre de vieilles statues de pierre ayant
fait partie de l’ornementation de l’église de St
Junien n’ayant pas été replacées depuis sa
restauration, avaient été mises dans quelques dépendances
de l’église. On demanda à M L’Archiprêtre
de St Junien de vouloir bien donner une de ces statues à la chapelle
d’Étricor. Celui-ci s’empressa d’accorder ce
qui lui était demandé et poussa la gracieuseté
jusqu’à prier les impétrants de venir eux-mêmes
choisir la statue à leur convenance.
Or, comme dans ces conditions, il ne coûtait pas plus cher de
s’offrir un évêque qu’un moine, et comme c’était
plus décoratif, on choisit un prélat du XIIe ou du XIIIe
siècle pour venir recevoir à Étricor les hommages
que l’on rend à Saint Pardoux. »
Un « restaurateur bricoleur» local reçu la mission
de convertir ce St Jean-Baptiste en St Pardoux. La restauration dut
être faite à moindre frais et bâclée, car
les recollages étaient visibles et peu précis. La chapelle
put accueillir les pèlerins, et la dévotion eut lieu de
nouveau avec cette nouvelle statue chaque année au deuxième
dimanche d’octobre, dimanche le plus proche de l’anniversaire
de la mort de St Pardoux (7 octobre 737).
C’est pour remettre cette statue de Saint Pardoux dans son état
primitif que les « Amis d’Étricor » après
l’avoir fait classer aux Monuments historiques le 28 novembre
2003, a confié sur les conseils de la DRAC la statue en juillet
2009 à Mme Brigitte Estève, professeur à l’École
supérieure de restauration de Tours, La statue est revenue dans
la chapelle d’Étricor fin juin 2010. C’est là
qu’elle nous a révélé que notre St Pardoux
était en fait un Saint Jean-Baptiste .
A signaler
que St Jean-Baptiste était le saint patron des mégissiers,
pas étonnant qu’elle vienne d’un des principaux centres
de mégisserie de France.