Cette celle
est située sur la commune de St Germain la poterie (Oise). C'est
la celle la plus isolée que j'ai visité (toutes visitées).
Elle se trouve à l'intérieur d'une très vaste propriétée.
Il reste qu'une
partie de la nef, sans voûte.
Vestiges :
Il ne subsiste de l'église qu'une partie de la nef (18 m de longueur
sur 4 m de largeur) sans voûte. Le passage du cimetière existait
encore en 1961, lors de la visite de J.R. GABORIT, mais il a totalement
disparu aujourd'hui.
Une porte a été ouverte sous la grande fenêtre du
pignon Ouest pour les besoins de l'exploitation agricole.
On note également une cave voûtée à l'emplacement
de l'abside.
Histoire:
La celle de Clairefontaine a été fondée par Philippe
de DREUX, évêque de Beauvais selon une charte de fondation
de 1207 .
En 1202, Philippe de DREUX s'était en effet transporté à
l'Isle-Adam pour y rencontrer Eude de SULLY, évêque de Paris,
afin d'y tracer, d'un commun accord, la ligne de démarcation entre
leurs deux diocèses. Ils eurent ainsi l'occasion de visiter les
Grandmontains établis dans les bois de Meynel.
Edifié par leur vie monastique, Philippe de DREUX leur donna 200
arpents de bois et 15 mines de terre qu'il avait acquis de son vassal,
le Chevalier Guy CORNU. Il leur accorda en outre la dîme d'Henvoile,
qu'il avait rachetée au chevalier Guillaume de RAVENEL, et une
vigne également achetée à un dénommé
PARMENTIER .
En 1209, le prieur de Grandmont, Adémar de FRIAC, trouvant ses
religieux trop à l'étroit et sans doute bien isolés,
échangea avec les moines de Beaupré 18 arpents de bois,
sur les 200 arpents qu'il avait reçut, contre 2 arpents et demi
de prairies, avec l'accord de son Chapitre et celui de Philippe de DREUX.
Dans son testament du 2 novembre 1217, Philippe de DREUX léguait
100 livres aux Grandmontains .
En 1218, Guillaume de la FRESNOYE et Laurence, sa femme, ainsi que Philippe,
leur fils aîné, "accompagné lui-même de
ses enfants et de ses frères", donnèrent aux Grandmontains
la dîme de Savignies et celle de Clairefontaine. Cette donation
fut confirmée par Milon de NANTHEUIL, évêque élu
de Beauvais.
On trouve ainsi différentes donations jusqu'en 1241 . Ensuite,
les libéralités semblent tarir.
En 1295, il y avait cinq clercs à Clairefontaine.
En 1317, la celle de Clairefontaine fut unie au prieuré du Meynel,
d'où les moines étaient venus lors de sa fondation .
Les XIVème et XVème siècles furent une succession
de malheurs pour la région : peste noire, guerre de Cent Ans avec
la lutte entre les Armagnacs et les Bourguignons. Pendant cette période
troublée, les moines ne semblent n'avoir plus rien écrit
sur leur maison de Clairefontaine.
Toutefois, le 24 septembre 1556, François de RAVEAU, prieur du
Meynel, pourvoit Clairefontaine avec Roland ROHAUD. Celui-ci en prend
possession le 16 octobre suivant. Le document mentionne "qu'en présence
de Pierre Vienne, notaire apostolique, et dudit Raveau, ledit Rohaud s'est
présenté à la porte de la chapelle et aussi de la
maison dudit prieuré de Clairefontaine, et ayant frappé
plus de vingt coups les dites portes, en présence de Gautier Godo,
clerc de la paroisse de St Germain la poterie"...
Roland ROHAUD ne fit que passer dans cette maison et il fut ensuite remplacé
par Guillaume de SAINCTS,qui lui même résigna sa charge le
14 septembre 1559.
En fait ces petits bénéficiers ne résidaient plus
à Clairefontaine, cette maison étant devenue une exploitation
agricole. Toutefois, dans le bâtiment des hôtes une chambre
à l'étage était réservée au prieur
de Meynel lorsqu'il était de passage.
On trouve ainsi un acte du 10 septembre 1578 dans lequel Christophe de
FRESNEAUX, laboureur à Auneil, "transporte et cède
" à Ch. DUBUS et Louis DESJARDINS, laboureurs à la
Neuville-sur-Auneuil, les années qui restent à faire du
bail à ferme que lui a fait "François de RAVEAU, écuyer,
prieur du prieuré des Bonshommes de Maffliers, de la maison et
hôtel seigneurial de Clair-Fontaine, dit les Bons-hommes, qui consiste
en grange, étables, bergerie, colombier, cour, cave, jardin et
puits, lieu fermé de pierre de blocailles, chapelle à chanter
messe en laquelle il y a cloche à sonner la messe, avec haute justice
et 28 mines de terre labourable..."
Le bail en question était de 1577 pour une durée de 8 années
à charge " de payer au seigneur bailleur 400 livres de ferme
par an, avec une douzaine de connilz (lapin de garenne), payable en sa
maison, aux Bonshommes du Meynel, moitié à la Saint Rémy
et moitié à Pâques communeaux...Le bailleur se réserve
une chambre haute, avec une étable, un cent de foin du pré
de Troussoy, un cent de fagot pour son usage, quand il viendra audit lieu,
et ledit preneur sera tenu de l'y recevoir, loger et nourrir et défrayer
lui deuxième, ses chevaux et un laquais..."
J.R. GABORIT écrit en 1963 dans sa thèse que "Clairefontaine
fut ruiné pendant les guerres de Religion".
Il semble que pendant la deuxième partie du XVIème siècle,
les moines grandmontains se soient repliés à Beauvais, car,
en 1586, il y avait une maison qui s'appelait "les Bonshommes"
dans la rue des Quatre fils- Aymon.
En mai 1592, les soldats de Biron, qui combattaient pour Henri IV, avaient
occupé Clairefontaine, et ces "locataires" n'avaient
sûrement pas dû améliorer les lieux... au point que
les Grandmontains s'étant plaint" à Messieurs de la
Ville, le Maire y envoya un tambour, seavoir pour quoy ils faisoient de
telles choses. Mais ils dirent qu'ils ne se souciaient du maire ni de
personne et qu'ils faisaient la guerre" .
Abandonné par les religieux, rarement visité par le bénéficiaire,
occupé par des soldats, les bâtiments de Clairefontaine ne
pouvaient que se détériorer. Aussi le 5 juin 1644, l'évêque
de Beauvais ému, envoya une personne visiter les lieux. Celui-ci
donna de la chapelle la description suivante:
" On trouva la voûte du choeur tombée, ses murailles
et sa nef prêtes à tomber, ses bestiaux, futailles, fumier
et grains dedans, sans vitres et les huis bouchées" .
Cet état de délabrement de Clairefontaine est confirmé
par le prieur commendataire qui demandera, en 1646, l'autorisation de
démolir la moitié de la nef de la chapelle " afin d'éviter
les frais d'entretien"... .
En effet, Antoine de BELLOY, prieur de Notre Dame du Meynel, adressa une
requête en 1646 à l'évêque de Beauvais, Augustin
POTIER de GESVRES, qui délégua son Vicaire Général,
Claude TRISTAN, le 17 avril 1646. Celui-ci était le lendemain à
Clairefontaine. Il constata que la chapelle avait 80 pieds de long, 20
pieds de large et 34 pieds de hauteur. La nef avait 68 pieds de long dont
34 pieds étaient irréparables. La maçonnerie du reste
de l'édifice était en mauvais état. Le choeur n'avait
pas de lambris en haut et il était sans vitres. L'autel était
presque entièrement démoli et il y avait bien pour 3.000
livres de réparation.
Il fut ainsi ordonné que les 34 pieds en mauvais état de
la nef seraient démolis et qu'un mur serait mis en place pour fermer
la partie restante qui sera transformée en grange. C'est sans doute
de cette époque que date l'ouverture de la porte sur le pignon
Ouest.
Les messes qui avaient été fondées en ce lieu furent
désormais acquittées au prieuré de Meynel, l'église
de Clairefontaine ne le permettant plus .
La discipline de l'Ordre se relâchant, l'Abbé Général
demanda et obtint du Grand Conseil l'arrêt du 6 mars 1736 qui le
déchargeait de l'obligation de faire célébrer l'office
divin dans toutes les annexes des prieurés .
En 1748, la communauté religieuse du Meynel n'était plus
composée que de Jean Baptiste BOUTANG, prêtre et prieur,
et de Dom Louis BOUDINOT, frère.
Le dernier prieur titulaire du Meynel fut Jacques-Noël RAZAT; avec
le frère RAYNAUD, il dressa l'état des biens du prieuré
de Meynel dans lequel l'annexe de Clairefontaine figure pour 600 livres.
Le 4 avril 1770 eut lieu le partage des menses conventuelle et priorale.
La pension des religieux RAYNAUD et BOUTANG avait été fixée
à 700 livres payable par quartier et d'avance.
Le prieur commendataire devait jouir, sa vie durant, de tous les biens,
meubles et immeubles. Les titres de propriété restaient
entre ses mains.
En outre, la délibération du Chapitre Général
permettait au prieur commendataire de vendre les lieux claustraux et d'employer
le prix de la vente pour la restauration de ceux qui étaient conservés.
C'est ainsi que Jacques-Noël RAZAT, prieur commendataire du Meynel
céda le 20 novembre 1777 une grande partie de son prieuré
à Louis-François de BOURBON, prince du sang, mais en gardant
Clairefontaine.
En 1791, le fermier de Clairefontaine paya une dernière fois son
loyer au prieur du Meynel. En effet le 26 mai 1791 Clairefontaine etait
mis en vente comme Bien de première origine. L'expertise fut réalisée
par Pierre CARON, expert nommé par le Directoire du district de
Beauvais, pour procéder à l'estimation des biens, soit :
1 - "75 perches de terrain, sur lequel est posé un corps de
ferme, composé d'une maison, chambre, grange, écurie, étable,
et cave à lait et autre bâtiment,compris cour et jardin,
fermé de murs".
2 - Suivent les estimations des terres, bois, pâtures, "bruierre
", et autres dépendances, "le tout affermé à
Simon Dumesnil et Marie-Anne Bertin, sa femme le 11 septembre 1780, pour
neuf années à commencer la première récolte
en 1784, par-devant Me Courti, notaire à Savigny, moyennant la
somme de trois cents livres" .
Par devant les administrateurs du Directoire du district, présidés
par Mr Joachim-Félix-Louis BLANCHARD de CHANGY, la maison de Clairefontaine
fut mise en adjudication le 24 juin 1791 pour la somme de 7.370 livres.
Personne ne s'étant présenté pour enchérir
après une attente d'une heure, l'adjudication définitive
fut remise au vendredi 7 juillet 1791. Ce jour là, en présence
de Mr BOUVILLER, maire de St Germain-la-Poterie, les biens portés
à 7.500 livres par l'enchère du sieur MESENGUY, furent finalement
adjugés pour 13.800 livres à Mr Pierre Nicolas LEGENDRE
BUREAU, pour son père Nicolas BUREAU, bourgeois de la ville de
Beauvais .
En Beauvaisis - mesures agraires : le Pied = 29,9 cm
perche = 26 pieds = 7,775 m
arpent = 100 perches mais avec une perche variable selon les terrains..
arpent de labours = 2.553 m2
arpent de prés = 3.064 m2
arpent de bois = 4.290 m2
Pour
de plus amples renseignements consulter les "Cahiers Grandmontains"
n° 7. |
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